Être bon·ne élève au collège, c’est parfois difficile à assumer. Okapi, le magazine Bayard Jeunesse des 10-15 ans, aide nos ados à faire face et à reprendre confiance quand l’étiquette d’« intello » devient trop lourde à porter… et que les plaisanteries risquent de dégénérer en harcèlement.
Quelle fierté de voir son fils ou sa fille recevoir les félicitations des enseignants au conseil de classe ! On le/la voit travailler durement à la maison, le soir après le collège, on sent qu’il/elle progresse et s’intéresse à beaucoup de choses, les notes suivent… C’est gratifiant ! Pour le collégien ou la collégienne, c’est aussi une belle récompense. Les bonnes notes, les compliments, la reconnaissance, ça stimule. Mais être un·e élève brillant·e, c’est parfois difficile à assumer, ce dont, nous, parents n’avons pas toujours conscience…
« On me traite d’intello tout le temps. Comment faire pour que cela s’arrête ? »
En classe, le bon élève peut rapidement se retrouver avec une étiquette d’« intello » collée sur le front. Une parmi d’autres : dans une classe, on trouvera aussi le rêveur, le chahuteur, le leader, le cancre… Autant d’archétypes souvent très réducteurs. Pour l’intello, qui se caractérise par son côté « bon élève, sérieux, appliqué, participatif, qui-a-réponse-à-tout », l’étiquette sera sans conséquence si l’élève a le recul nécessaire pour s’en amuser avec ses camarades et aussitôt désamorcer la moquerie (ce qu’il faut faire !). Mais cela peut vite dégénérer en harcèlement dès lors que cela s’accompagne de comportements malveillants : isolement, jalousie, insultes répétées, brimades, exclusion du groupe…
À la rédaction d’Okapi, nous recevons parfois des courriers qui expriment la crainte que tout cela arrive. « Je suis en 6e et j’ai 18,48 de moyenne générale, nous écrit ainsi un garçon de 11 ans qui ne précise pas son prénom. On me traite d’intello tout le temps. Comment faire pour que cela s’arrête ? ». Une lectrice, elle aussi sous couvert d’anonymat, renchérit, en ajoutant la question de l’apparence à celle des bons résultats : « Je vais peut-être avoir un appareil dentaire. J’ai peur qu’on se moque de moi. En plus, comme j’ai de bonnes notes à l’école, on va me traiter d’intello ! Aidez-moi ! ». Pour d’autres encore, on peut remplacer l’appareil dentaire par les lunettes…
Les conseils d’Okapi pour reprendre confiance et être soi-même
On le sent au ton de ces courriers, l’affaire est sérieuse tant elle entraîne des situations de mal-être susceptibles de passer sous les radars des parents. Comment y faire face, pour l’ado, et repérer les signaux d’alerte ? Okapi, dans son numéro du 1er février, livre ses conseils pour mieux supporter cette situation et tenter de la déminer. Sûrement pas en modifiant ce que l’on est – en se mettant à mal travailler, par exemple –, ce qui serait catastrophique. Mais, bien au contraire, en assumant qui l’on est, tout en s’ouvrant aux autres : montrer sa curiosité, parler de ce qu’on aime, avoir des activités hors du collège (théâtre, musique, sport…) pour se faire aussi des amis ailleurs. Et bien sûr y mettre une touche d’humour en trouvant la répartie qui fera mouche ! Autant de façons de se redonner confiance, de gagner en maturité, de modifier le regard des autres.
De notre côté, il nous est utile en tant que parents d’aider nos ados en partageant, pourquoi pas, ses propres expériences, afin qu’il ou elle se sente encouragé(e) à se confier. On peut aussi, comme le fait Okapi, souligner que le collège n’est qu’une phase transitoire de la vie des ados. Au lycée, les choses changent, les élèves prennent de nouveaux repères, les grandes échéances se rapprochent… et les « intellos » deviennent les exemples à suivre !
Jean-Yves Dana, rédacteur en chef du magazine Okapi
« On me traite d’intello » : des collégien(ne)s témoignent dans Okapi
Des lunettes, de bons résultats scolaires… Il en faut peu pour être catalogué(e) comme un(e) intello. Attention à ce que les plaisanteries ne virent pas au harcèlement ! Okapi donne quelques conseils à nos ados dans cet article extrait de la rubrique « On se dit tout » du magazine.
« Je me mets trop la pression. Pour les notes, pour être cool, avec mes amies, avec mes parents, avec mes petits frères, avec les profs pour qu’ils m’apprécient… Je veux constamment bien faire et je m’en veux quand j’ai l’impression de ne pas avoir réussi. Mes amies m’ont déjà dit que j’étais trop sérieuse en classe et on me traite d’intello. » Anonyme (fille), 12 ans
« Je vous écris car je me demandais pourquoi des gens disent qu’il faut choisir entre des bonnes notes et des bons copains… Moi, j’ai des bonnes notes, mais j’ai aussi plein de bons copains ! » Lalie, 10 ans
« Je vais peut-être avoir un appareil dentaire. J’ai peur qu’on se moque de moi, que je ne m’y habitue pas ou que ça me fasse mal. En plus, comme j’ai de bonnes notes à l’école, on va me traiter d’intello ! J’ai trop peur d’en avoir un. Aidez-moi ! » Anonyme (fille)
« Je suis en 6e et j’ai 18,48 de moyenne générale. On me traite d’intello tout le temps. Comment faire pour que cela s’arrête ? » Anonyme (gars), 11 ans
« Je me moque d’être vue comme une intello. Je me donne juste les moyens pour pouvoir faire le métier de mes rêves : architecte d’intérieur ! » Fiona, 14 ans
« Parfois, c’est dur. Mais mon frère aussi a connu ça. Il me donne des conseils pour supporter les moqueries, et pouvoir lui en parler me soulage. » Thomas, 12 ans
Faire des efforts d’adaptation
Tes résultats du premier trimestre te rangent dans la catégorie « élève brillant(e) » ? Tu peux en éprouver une fierté légitime. Le hic, c’est que tu peux te sentir un peu dénigré(e) par les autres élèves. Un peu de jalousie peut-être… Dans ces conditions, possible que tu aies la tentation de rentrer dans ta coquille et de t’isoler du reste de la classe. Ce n’est pas une bonne idée. Avoir de bons résultats et entretenir de solides amitiés, c’est possible !
À défaut d’être ami(e) avec tout le monde, sélectionne les bonnes personnes : sincères avec toi, prêtes à t’épauler en cas de problème. Pour gagner leur confiance, évite de leur parler en boucle du dernier cours de maths, des profs ou de ton excellente moyenne. Sois ouvert(e), intéresse-toi aux autres. La conversation porte sur un manga qui cartonne ? Tu peux saisir l’occasion pour poser des questions, montrer ta curiosité. Et dévoiler tes goûts : ton style de musique, tes passions, etc. C’est le meilleur moyen de changer les regards sur ta personne.
Vivre ta vie d’ado
Parfois, la pratique d’une activité hors du cadre scolaire permet de déjouer le piège de l’isolement. Inscrit(e) à un club de sport, de théâtre ou de musique, tu pourras exorciser ce qui te tracasse, mieux contrôler tes émotions. Et faire des rencontres avec des jeunes de ton âge qui ne te connaissent pas sous l’étiquette d’excellent(e) élève. Ce sera ta bulle d’air loin du collège. Parfait pour garder confiance en toi et vivre de nouvelles expériences.
Assumer tes goûts
Faire des activités, s’ouvrir aux autres… Pas si facile ? Le but est d’apprendre à t’accepter, à t’affirmer tel(le) que tu es. Tu n’as aucune raison de changer tes goûts ou ton comportement en classe pour plaire aux autres. Tu aimes participer ? Alors continue ! Tu adores afficher une attitude sérieuse ? Cool ! Si tu montres de l’assurance, cela pourrait même donner envie à d’autres de se rapprocher de toi et, pourquoi pas, de suivre l’exemple.
Te projeter dans l’avenir
Malgré tous ces conseils, l’étiquette d’intello te colle encore à la peau ? Ne perds pas espoir : les choses évolueront quand tu seras au lycée. Tu te retrouveras mélangé(e) à des élèves d’autres collèges, indifférent(e)s à ta « réputation ». Et puis, toutes et tous, vous allez grandir, gagner en maturité… Tes camarades seront moins enclin(e)s à pointer du doigt les « intellos », trop occupé(e)s à bosser dur pour préparer le baccalauréat. Bref, une autre histoire…
À éviter si on est traité(e) d’intello
Ne plus rien faire
Fatigué(e) des moqueries, tu penses avoir trouvé la solution parfaite : arrêter de travailler pour ne plus être traité(e) d’intello. À éviter bien sûr ! Tu gâcherais ta scolarité et ça te rendrait malheureux(se), sans compter les questions de tes parents et de tes profs qui trouveraient ça très louche…
Se mettre la pression
À l’inverse, évite de te mettre trop la pression avec ta moyenne. Vouloir réussir, c’est super. Perdre le sommeil à cause d’une note décevante, un peu moins ! Les évaluations loupées, ça arrive. No stress.
On te traite d’intello ? Le top des réparties
« Bouge pas, je vais diminuer mon QI pour te comprendre. »
« Merci du compliment, mais je suis sûr(e) que tu peux en faire autant ! »
« Si la bêtise était un sport, alors toi, tu serais champion(ne) du monde ! »
« Désolé(e), je vais essayer de me mettre à ton niveau : ‘AREU AREU’ ! »
Quand ça vire au harcèlement, on fait quoi ?
Les conseils d’Emmanuelle Piquet, psychopraticienne, co-autrice du Manuel de survie face aux harceleurs et autres brutes de la cour d’école, éd. Les Arènes.
Pour se défendre, il existe deux outils très efficaces : l’autodérision et l’humour. L’autodérision, c’est savoir rire de soi-même. Et pour un(e) harceleur(se), c’est déstabilisant de se moquer d’un(e) élève qui se moque déjà de lui-même ! Au début, ce n’est pas facile à pratiquer… L’idée, c’est de s’entraîner avec un(e) ami(e) pour trouver LA phrase à répondre. Comme au théâtre ! La touche d’humour sert à ridiculiser la posture du harceleur, à se moquer de sa manière d’agir. Mal à l’aise, il ou elle arrêtera. Si les choses vont trop loin, n’hésite pas à en parler à un adulte de confiance qui t’aidera et n’agira pas sans ton accord.