Les attentats que nous connaissons depuis hier, 13 novembre, nous choquent tous. Nous vous proposons, parents, adultes, de relire cette interview de la pédopsychiatre Catherine Jousselme qui, au moment des attentats de janvier 2015, nous expliquait comment les enfants réagissent à des évènements violents de ce type et comment nous pouvons leur en parler.
Les enfants, petits et grands, qu’ils aient été confrontés à l’information directement ou pas, ressentent cette atmosphère et nos sentiments très vifs. La première chose à faire, quel que soit l’âge de vos enfants, est de les informer directement.
Il faut leur expliquer ce qui s’est passé : un attentat, des morts, des gens qui ne veulent pas qu’on exprime librement ses idées. Bien sûr, suivant l’âge des enfants, les réponses et les explications seront différentes. Le professeur Catherine Jousselme, pédopsychiatre à la Fondation Vallée à Gentilly, nous aide à trouver les bons mots et les bonnes réactions.
Avec un petit de moins de 6 ans, Catherine Jousselme conseille de ne pas montrer d’images et d’en rester à l’information de base. Les adultes doivent dire que ce qui vient de se passer est grave pour tout le pays, que cela les touche et les émeut. Surtout, les enfants doivent comprendre que les adultes sont là et s’organisent pour protéger tous les habitants de la France.
Les enfants plus grands, jusqu’à 10 ou 11 ans, doivent pouvoir en parler. À leurs questions, mais sans les devancer, il faut apporter des réponses factuelles. Les échanges avec vous doivent aussi leur permettre de comprendre que les adultes, et l’État, veillent à ce que cela ne se reproduise pas, que les coupables sont recherchés et que la fraternité et la solidarité sont les seules réponses possibles. Parler avec eux, leur proposer de dessiner ce qu’ils ont compris, expliquer les images s’ils y ont été confrontés : ce sont des façons simples de leur permettre de juguler des inquiétudes et des angoisses qui pourraient les envahir.
Cependant les enfants ne réagissent pas tous de la même façon et certains seront plus touchés que d’autres malgré l’attention des parents. Un enfant qui ferait des cauchemars fréquents dans les semaines qui viennent, qui perdrait le goût de jouer ou de manger devra être l’objet d’une attention toute particulière. Il faudra l’inciter à s’exprimer, en discutant, en dessinant avec lui. Voire en lui permettant de rencontrer un professionnel – médecin, psychologue, psychiatre – qui saura l’aider.
Les adolescents sont eux exposés à l’information très directement via internet et les réseaux sociaux. Plus ils sont informés, plus il est nécessaire d’être présent auprès d’eux. Il faut les aider à cadrer leurs réactions et redonner des informations simples sur la loi qui protège la liberté d’expression et pose l’interdit du meurtre ainsi que la nécessité d’être solidaires face à un événement d’une telle violence qu’elle peut entraîner des réactions en chaîne. Il est important qu’ils sentent que les adultes sont des soutiens solides, tant dans la famille qu’à l’école.
Certains peuvent être confrontés à des propos violents d’autres adolescents autour d’eux ou sur les réseaux sociaux. S’ils vous rapportent ces propos, il faut les assurer que la réponse n’est pas dans cette spirale de la violence et signaler éventuellement ces comportements au collège ou au lycée. Ce sont aux adultes de régler ces questions, pas à eux. Enfin, il ne faut pas les laisser seuls confrontés à toutes les images auxquelles ils ont accès si facilement sur leurs téléphones, leurs ordinateurs ou à la télévision. Ce flot d’images peut être très angoissant et les enfermer dans une vision très dégradée de la vie en société. Aidez-les à faire autre chose et à discuter, notamment à l’aide de ce document réalisé par le magazine Astrapi.
La citation de Martin Luther King, reproduite dans un poster publié dans le n° 848 du 15 novembre d’Astrapi, est illustrée par Aurélie Grand.
Propos de Catherine Jousselme recueillis par Hélène Hauri.