La lecture à voix haute, remise au goût du jour par le jeu des “Petits champions de la lecture”, dont le magazine J’aime lire Max est partenaire, enthousiasme les jeunes lecteurs. Qu’ils aiment lire… ou pas, pourquoi leur plaît-elle tant et que leur apporte-t-elle ? Explications de Claire Clément, auteure jeunesse et responsable des romans à J’aime lire Max.
À quoi ça sert de lire à voix haute ?
“En tant qu’auteure jeunesse, je suis souvent invitée dans les classes. Chaque fois, je constate qu’un groupe restreint d’élèves aime lire – plutôt des filles – et que les autres subissent la lecture obligatoire d’un livre conseillé par l’enseignante en vue d’une rencontre auteur/lecteur. Dans ce contexte, en intervenant, je me fixe un objectif prioritaire : donner envie de lire à ces enfants qui n’en ont pas le goût. Si bien que mon animation est conçue de façon à retenir leur attention : je leur raconte des anecdotes amusantes, je stimule leur créativité en leur proposant d’imaginer une suite au livre lu et, en fin de rencontre, je leur lis une histoire, choisie avec soin, afin de susciter leur enthousiasme. C’est là que j’obtiens en général un silence de cathédrale.
La lecture à voix haute interpelle, séduit, capte un auditoire qui entre sans grand effort, dans un univers. C’est de la théâtralité, mise en scène par la voix du lecteur, par ses yeux, ses mimiques, son aura. Les enfants font ainsi l’expérience, en classe, d’une lecture ludique, d’une lecture de plaisir.
Après cette séance de lecture, ils viennent me voir pour avoir la référence du livre, savoir où ils peuvent se le procurer, si j’en connais d’autres qui lui ressemblent… Par la lecture à voix haute, l’appétit de lire leur est venu.”
Un plaisir partagé
“Je participe en tant que jury à l’évènement Les petits champions de la lecture. Des enfants de CM2, qui se portent candidats, sont invités lire à voix haute un texte de leur choix. Quel plaisir de les entendre ! Et ce plaisir est partagé : ces enfants se donnent à cette lecture avec passion.
En les observant, je ne peux m’empêcher de penser à ces autres enfants, non entraînés à la lecture, et qui se retrouvent seuls et désarmés, avec un livre qu’ils doivent absolument lire : comme il est difficile, quand on est peu familiarisé à cet exercice, d’ouvrir la première page, de s’autoriser à s’abandonner, à pénétrer dans un autre univers, et à faire sien les mots, les phrases d’un auteur, qu’on ne connaît pas. Et alors peut surgir l’ennui, et avec lui, la culpabilité de ne pas trouver d’intérêt à la lecture, et en écho, le sentiment d’échec.
Lire un auteur, dans l’intimité de sa chambre, et le digérer seul n’est pas toujours confortable. La lecture silencieuse demande une bonne confiance en soi. La lecture à voix haute aussi, car il faut oser braver le regard de ses camarades, se soumettre à leurs critiques, et peut-être à leurs moqueries pour peu qu’on trébuche sur un mot, être à l’aise avec sa voix, son corps… Mais celle-ci a un atout supplémentaire : celui de partager une expérience, de communiquer des émotions, de donner à voir un univers.
Comment bien lire à voix haute ?
Pour que cette lecture à voix haute soit réussie, il est nécessaire de se préparer, et d’acquérir une technique : travailler sa voix, sa gestuelle, son intonation, son regard, car ils sont vecteurs de sens. Une fois ces compétences acquises, l’attention de l’auditoire se déplace du lecteur au texte. Et le désir de transmettre ce plaisir de lecture rend moins important le fait que peut-être dans ce texte, certains passages restent encore obscurs. Mais faut-il absolument le décortiquer ? L’expliquer ? Est-il nécessaire d’être un lecteur éclairé pour lire à voix haute ? Doit-on peser chaque mot, connaître la psychologie des personnages, être au plus près de ce que l’auteur a voulu transmettre ? Non.
La lecture doit être libre, sans carcan. Un enfant qui prend un texte en main doit donner sa propre vision, sa vivacité, son originalité. Il prend possession d’un texte, et pour cela il doit l’avoir déjà lu, bien sûr, avoir dépassé le stade du déchiffrage, pour se l’approprier, et le rendre attractif, actuel, vivant par sa seule interprétation ; laquelle, peut-être, ne sera pas tout à fait celle de l’auteur… Est-ce si grave ? Son enthousiasme fera la différence, ainsi que la façon dont ses mains, ses yeux, les intonations de sa voix, son visage s’exprimeront. Ils susciteront chez d’autres enfants le plaisir de lire. Petit à petit, grâce à cette théâtralité, les personnages de sa lecture deviendront de vieux camarades, pour lui et pour les autres. Et après plusieurs lectures, le sens lui apparaîtra, plus subtil, plus profond, plus nuancé.
Pour les enfants peu lecteurs… aussi !
Les enfants peu lecteurs préfèrent en général la lecture à voix haute, une fois les compétences techniques acquises, car elle les sort d’un système laborieux d’explication de texte, pour les placer dans un corps à corps avec un texte, qui devient ludique et personnel, car ils travaillent à son appropriation avec tous leurs sens.
Enfin, la lecture à voix haute permet de prendre conscience de l’effet d’un récit sur ses camarades, dont on aperçoit les sourires, les regards embués, ou l’intérêt grandissant. On saisit mieux les enjeux de la lecture. Et quel pouvoir on se découvre ! Sans aucun doute, grâce aux aptitudes multiples et relationnelles qu’elle requière, la lecture à voix haute renforce la personnalité du lecteur et accentue son estime de soi.
Le magazine J’aime lire Max donne dans son numéro d’octobre 2016, des conseils à ses lecteurs pour les aider à devenir des as de la lecture à haute voix. Téléchargez ces astuces pour votre enfant !
Si votre enfant souhaite participer avec sa classe à l’édition 2017 du jeu des Petits champions de la lecture, consultez le site des Petits champions de la lecture
En savoir plus sur Claire Clément
Depuis de nombreuses années, Claire Clément mène de front une double carrière : journaliste jeunesse à Bayard (Pomme d’Api, Youpi, Les Belles Histoires et maintenant J’aime lire Max) et auteure jeunesse prolixe, écrivant aussi bien des histoires pour les plus jeunes que des romans pour adolescents (Noé ; La petite Caillotte – qui fait partie de la sélection de l’Éducation nationale ; la longue série des “Essie” ; Sami, Goliath, Oscar, Ousmane et les autres… publiés chez Bayard). Aimé (éditions Talents hauts) est son dernier ouvrage paru.