“On étudie mieux dans le calme”, “Stresser peut tout faire oublier”, “Les fiches, une valeur sûre !”… Le magazine Phosphore, avec Franck Ramus, chercheur au CNRS, passe au crible les idées reçues sur le fonctionnement de la mémoire. Des informations précieuses pour apprendre ses cours tout au long de l’année et réviser efficacement à l’approche des examens…
On est plutôt visuel ou auditif : FAUX !
« On peut avoir des habitudes, et/ou l’impression que l’on retient mieux ce que l’on voit ou entend. En réalité, tout le monde est les deux ! Les recherches ont surtout montré que l’on mémorise mieux une information si elle fait appel à nos différentes mémoires : visuelle (un texte ou une image, par exemple), auditive (un son), spatiale (liée à la représentation dans l’espace), et kinesthésique (liée aux gestes). Plusieurs méthodes d’apprentissage efficaces combinent ces différentes mémoires. C’est le cas de la lecture à voix haute. Elle associe le souvenir des mots écrits, des mots entendus, et de leur articulation. En termes scientifiques, on parle de triple encodage. »
Les cartes mentales sont une perte de temps : FAUX !
« Selon les chercheurs, elles sont très utiles, à condition de ne pas recopier le cours de manière superficielle, mais de structurer de manière visuelle les liens entre les concepts. Ces derniers peuvent avoir des liens de chronologie, d’ordre, de causalité, de descendance, d’inclusion (chien est inclus dans animaux, lui-même inclus dans êtres vivants), etc. La carte mentale est une des méthodes d’apprentissage particulièrement efficaces qui sollicitent les différentes mémoires évoquées plus haut. Elle mêle le geste (on la fait), la vue (elle prend la forme de branches d’arbres), et l’ouïe si on la lit à haute voix. »
Écouter en cours, c’est déjà apprendre : VRAI !
« Une phrase souvent employée par les profs ! Il existe une variante : “Si tu as écouté en classe, tu as déjà fait la moitié du travail.” Dans tout apprentissage, il faut bien sûr une première exposition au contenu. Si tu n’es pas attentif·ve quand ton prof explique, tu rates cette occasion-là. Tu devras découvrir le cours par toi-même, en lisant le manuel par exemple. C’est dommage, parce que le temps passé en cours est gâché. À l’inverse, écouter ne dispense pas de réviser. Et “écouter” veut dire : essayer de comprendre ce qu’on entend, et non pas simplement écrire sous la dictée. Ajouter des exemples, des remarques et des questions perso pendant la prise de notes est compliqué… à moins que le cours ne soit excessivement lent ! C’est un travail utile, mais dans un second temps. »
Les fiches, valeur sûre : FAUX !
« En fait, tout dépend pourquoi et comment tu les fais. Faire des fiches en lisant le cours et en recopiant les mots-clés n’est pas une activité qui fait correctement apprendre. Il faudrait pour cela les rédiger de mémoire, c’est-à-dire sans regarder le cours. Mais tu peux très bien faire des fiches pour avoir une version résumée du cours, puis t’en servir comme base pour te questionner. Dans ce cas-là, les fiches ne marquent pas la fin de l’apprentissage, mais le début ! »
Se faire réciter, ça marche : VRAI !
« Pour répondre à une question (qu’elle soit de toi ou pas, peu importe), tu fais ce qu’on appelle un “effort de récupération en mémoire”, effort qui vient renforcer un peu plus le souvenir de l’information qui répond à cette question. Se faire réciter est utile, et pour ce faire il existe plein de petits jeux. Tu peux cacher des passages du cours, rédiger des textes à trous, inventer des quiz ou QCM, faire du “rappel libre” en écrivant tout ce dont tu te souviens du cours. Tu peux aussi créer des flashcards, des bouts de papier avec question d’un côté, et réponse de l’autre. Il existe même des applis de flashcards, comme Quizlet ou Anki. »
Surligner permet d’enregistrer : FAUX !
« Surligner des titres et mots-clés est une activité généralement trop superficielle pour être efficace, puisqu’elle ne t’oblige pas à t’intéresser vraiment au sens de ce qui est écrit. Si un cours qui comporte des couleurs ne te fait pas apprendre mieux, il peut toutefois te donner envie de te mettre au boulot. C’est déjà ça ! »
On étudie mieux dans le calme : PAS FORCÉMENT !
« Le silence est préférable car l’attention, qui est facilement distraite, est indispensable à l’apprentissage. Après, certains affirment que la musique les aide à se concentrer. Là-dessus, voici ce que dit la science : la musique instrumentale perturbe peu, tout comme une musique dont on ne comprend pas les paroles. Mais entendre une langue qu’on comprend, qu’elle provienne d’une chanson ou d’une conversation, perturbe forcément. »
On apprend mieux seul : PAS FORCÉMENT !
« Que l’on révise seul ou à plusieurs, il faut choisir des méthodes d’apprentissage qui obligent à récupérer les infos en mémoire, et à en comprendre le sens. Avec tes potes, vous pouvez vous interroger mutuellement, ou vous expliquer ce que vous avez compris du cours. »
C’est mieux de réviser juste avant de se coucher : FAUX !
« Contrairement à ce qu’on pense, il n’y a pas de bénéfice particulier à réviser juste avant de se coucher, plutôt qu’une heure ou trois heures avant. Le sommeil est important dans le sens où il permet de consolider les souvenirs de la journée. Si tu te couches tard la veille d’une interro pour réviser, non seulement tes connaissances ne seront pas bien consolidées (il faut réviser régulièrement), mais surtout tu seras crevé et donc moins performant le jour J. »
On ne peut pas apprendre en une fois : VRAI !
« Le but des révisions consiste à retarder l’oubli en renforçant le souvenir. Pour cela, il faut le solliciter régulièrement, par exemple en se testant, en s’interrogeant, en expliquant, etc. Le mot important ici, c’est “régulièrement”. Si tu veux apprendre durablement, on te conseille de planifier plusieurs révisions pour un même contenu, et d’espacer de plus en plus ces révisions. Par exemple : une première révision une semaine après la première exposition au savoir (cours en classe, lecture d’un chapitre, visionnage d’une vidéo), une deuxième un mois plus tard, puis enfin une troisième trois à six mois plus tard. »
Mieux vaut ne pas mélanger les matières : FAUX !
« Pour se préparer aux épreuves finales du bac, par exemple, certains élèves préfèrent réviser toute une matière, avant de passer à une autre, et ainsi de suite. De manière générale, il vaut mieux apprendre un cours ou un chapitre en plusieurs fois, et donc alterner les enseignements. Par exemple, si tu as un chapitre d’histoire et un de SVT à emmagasiner, apprends celui d’histoire, puis celui de SVT, avant d’y revenir deux semaines plus tard. À temps de révision égal, l’effort accompli pour récupérer (et donc ré-ancrer) les informations en mémoire est ainsi bien plus bénéfique. »
Stresser peut tout faire oublier : FAUX !
« Le stress ne te fait pas oublier ce que tu as appris, mais il peut te fait perdre tes moyens, et temporairement entraver l’accès aux connaissances stockées dans ta mémoire. Bien maîtriser ses connaissances peut donner confiance en soi, et chez certains diminuer le stress. Mais pas chez tout le monde. »
Certains sont au top le matin, d’autres le soir : VRAI !
« La science a découvert qu’il existe véritablement deux “chronotypes” dans la population : les gens du matin, et ceux du soir ! Pour savoir dans quel camp tu te trouves, tu peux répondre au test “quel est votre chronotype ?” publié sur le site Psychomédia, et validé par la communauté scientifique. Ces catégories ne sont pas étanches. Si tu es plutôt du soir, cela ne veut pas dire que tu ne peux pas du tout réviser le matin, et inversement. »
Lire permet de bien retenir : FAUX !
« Le problème de la lecture, c’est qu’elle n’oblige pas à traiter le sens profond de ce qu’on lit. Si tu lis de manière automatique et superficielle, c’est-à-dire sans faire attention à ce que tu lis, tu ne retiens rien ou pas grand-chose. Pour être efficace, opte pour des activités qui nécessitent de récupérer les informations en mémoire, de comprendre le sens, de manipuler les concepts. Tu peux résumer le cours sans le regarder et avec tes propres mots, faire des exos pour te rappeler les concepts et les manipuler, formuler des questions avant de les utiliser pour te tester. »
Les révisions, ça demande de l’organisation : VRAI !
« Mais, heureusement, il existe des outils qui simplifient la vie ! Tu peux fabriquer, acheter ou télécharger une “boîte de Leitner”. Ce système astucieux te permet de gérer tes révisions à l’aide des flashcards – question d’un côté, réponse de l’autre. Ta boîte peut comporter trois compartiments ou plus, symbolisant un niveau de maîtrise croissant. À chaque compartiment est aussi associée une fréquence de révision : toutes les semaines pour le premier, tous les mois pour le second, tous les semestres pour le troisième. Au départ, toutes les cartes sont dans le premier compartiment. Si tu réponds correctement à une question, la carte passe dans le compartiment supérieur. Si tu te trompes, elle retourne dans le compartiment inférieur. La boîte de Leitner est au moins utile pour les notions importantes ou compliquées à apprendre. »
Les moyens mnémotechniques, ça marche : VRAI !
« Il existe plusieurs méthodes mnémotechniques efficaces. La méthode du “palais mental”, par exemple, fait appel à ta mémoire spatiale. Elle est notamment employée par les mentalistes pour retenir, lors d’un spectacle, une longue liste de noms, de mots ou de dates données par le public. Elle t’invite à placer, mentalement, chaque élément d’une liste à mémoriser tout au long d’un parcours que tu connais bien. Puis, à emprunter à nouveau ce parcours dans ta tête pour retrouver facilement les éléments déposés.
Cette méthode est particulièrement utile en histoire-géo, pour te souvenir des métropoles françaises, ou encore les pays de l’Union européenne. Exemple : sur le trajet maison-lycée, tu places un premier mot sur le palier de ta porte, puis devant la maison du pote que tu passes prendre tous les jours, et ainsi de suite jusqu’au lycée. Encore une fois, cette méthode est pertinente pour une liste arbitraire. Pour un chapitre construit, focalise-toi plutôt sur le sens, la chronologie, les relations entre concepts. »
Pour apprendre, il faut le vouloir : FAUX !
« Être motivé n’est pas vraiment une condition pour apprendre, mais ça aide à se mettre au boulot. En tous cas, il ne faut pas attendre d’être motivé pour s’y mettre. Plus on travaille, plus on apprend, plus on réussit, et plus on est motivé pour travailler. C’est le “cercle vertueux de la réussite” ! Pour y entrer, fixe-toi une routine qui te pousse à travailler régulièrement. »
On peut apprendre une bonne fois pour toutes : FAUX !
« Rien n’est jamais appris définitivement. Un savoir dont on ne se sert pas, ou que l’on ne se remémore pas, finit inexorablement par être oublié. C’est comme ça ! »
Il faut commencer à réviser le soir même : FAUX !
« Il vaut mieux laisser passer une nuit de sommeil entre la première exposition au contenu (le cours du prof, par exemple) et la première révision. Et ce pour une raison simple : le soir même, le contenu est trop frais en mémoire ! Pour ancrer un peu plus le savoir, il faut se le rappeler alors qu’on a commencé à l’oublier. Il est utile de réviser chaque soir, mais mieux vaut donc potasser les cours de la veille ou de l’avant-veille. Ce sera plus difficile mais plus efficace. »