À l’adolescence, il y a des choses que les ados aimeraient dire à leurs parents, mais qui restent coincées et brûlent la langue… Des choses qui émergent parce qu’ils ont quitté l’enfance, parce qu’ils vivent de nouvelles expériences, parce qu’ils voient le monde autrement… Le magazine Okapi leur donne des conseils, en 10 exemples, pour oser en parler. Un article à lire en famille dans le n° 1164 du 15 octobre ou à télécharger ci-dessous…
Le magazine Okapi aide les ados à oser parler
Jean-Yves Dana, rédacteur en chef du magazine Okapi :
L’adolescence n’est pas un âge si éloigné lorsqu’on est parent. Et nous pouvons toutes et tous ressentir, à travers ce que vivent nos propres ados, ces petits moments de solitude angoissée mêlée de stress où, vers 12 ou 13 ans, on a quelque chose de délicat à dire à sa mère ou à son père sans savoir comment s’y prendre… Des choses qui émergent parce qu’on a quitté l’enfance, parce qu’on vit de nouvelles expériences, parce qu’on voit le monde autrement, et qui se bousculent soudain dans la tête, mais restent coincées et brûlent la langue… Alors aidons-les !
On ne parle pas ici de lourds secrets douloureux – mal être profond, harcèlement ou abus, quel qu’il soit – pour lesquels les conseils d’Okapi, numéro après numéro, iront toujours dans le même sens : encourager à parler, donner l’alerte et le faire coûte que coûte. Cela peut être, en revanche, l’un de ces tracas ou cette simple appréhension, fondée ou pas, qui ne sortent jamais, parce que “ce n’est pas le moment”. Une demande délicate à formuler, une petite faute à avouer, une boule dans le ventre dont on aimerait se libérer, si possible sans se prendre une réflexion en retour…
Il y a pléthore d’exemples. En voici quelques-uns : “J’apprends le piano depuis quatre ans, hélas je ne pense qu’à arrêter et faire autre chose… Mais comment leur annoncer sans les décevoir, eux qui me voyaient déjà concertiste ?” Ou bien : “Je fais ce que je peux pour bien bosser… Alors comment leur faire comprendre qu’ils pourraient arrêter de me mettre la pression sans cesse sur les devoirs à faire, la leçon à apprendre pour le lendemain ?” Sans oublier ce classique du genre : “J’aimerais plus d’argent de poche… Mais comment leur dire sans qu’ils se braquent ?”
D’autres situations sont plus intimes, bien sûr, et porteuses d’enjeux bien plus forts encore : la première fois qu’on se met “en couple”, les premières règles, l’attirance pour une personne du même sexe, sans savoir si c’est de l’amitié ou plus. En parler ou pas, et à quel moment ? Autant de cas de figure, et d’autres encore (dix en tout), qu’Okapi passe au crible dans son numéro du 15 octobre, en proposant autant de petites stratégies pour désamorcer la tension qu’elles peuvent faire naître. Et, au bout du compte, en incitant les ados à oser dire ce qu’ils et elles ressentent, et à considérer leurs parents pour ce qu’ils sont : des alliés, qui réagissent avec leurs propres émotions, mais toujours prêts à les aider et à les aimer !
Lire l’intégralité de l’article “Comment le dire à tes parents ?”
Vous pouvez télécharger l’article du magazine Okapi “Comment le dire à tes parents ?” ou le lire ci-dessous.
“Vous me mettez trop la pression”
L’état des lieux
“Tu as fait tes devoirs ?”, “Prêt(e) pour ton contrôle de demain ?”… Tes parents associent ta réussite au collège à ton bonheur présent et futur. Cela peut se comprendre, mais si ce sont les seules questions que tu entends le soir, normal que tu veuilles dire stop. Alors comment s’y prendre sans les braquer ?
Le conseil d’Okapi
Plutôt que de nier l’inquiétude de tes parents à coups d’expéditifs “T’inquiète, je gère” – ce qui les rendra encore plus anxieux ! –, explique-leur que tu comprends leur stress, mais que tu as besoin de leur confiance pour te sentir dans un climat de réussite.
- L’astuce en + : Tiens-les informés régulièrement de ton travail, et n’oublie pas d’accompagner tes propos d’actes concrets : organise ton travail, fais un planning… et montre-leur. Très vite, si tu les habitues à prendre les devants, ils seront moins sur ton dos.
“J’ai mes premières règles”
L’état des lieux
À l’adolescence, quand on est une fille, c’est déjà dur d’accepter les changements de son corps, alors en parler avec ses parents… Outre que cela touche à ton intimité, tu redoutes que cela les perturbe de te voir devenir une femme. Bref, tu te passerais bien d’aborder le sujet en famille.
Le conseil d’Okapi
C’est important que tes parents soient au courant de l’évolution de ta puberté, donc il faut te lancer, quand bien même ce n’est pas un sujet de discussion facile. Rien ne t’empêche de te tourner vers ton père, mais ta mère, passée autrefois par cette étape des premières règles, reste ton interlocutrice naturelle pour en causer.
- L’astuce en + : Profite d’un moment tranquille avec ta mère pour orienter la conversation sur tes amies qui ont déjà leurs règles. Elle comprendra vite ! Ou quand vous irez faire des courses, entraîne-la au rayon des protections périodiques. Tu pourras lui poser toutes tes questions.
“Je suis homo”
L’état des lieux
Tu te sens plutôt attiré(e) par une personne du même sexe que toi. Et ce ressenti devient si envahissant qu’il te paraît lourd à porter sans le partager. Ne pas le dire à tes parents, ce serait comme leur mentir, as-tu l’impression. Mais tu redoutes leur réaction.
Le conseil d’Okapi
Parler de sa sexualité (car l’attirance, ça en fait déjà partie) avec ses parents, ça n’est évident pour personne. Alors, rien ne t’y oblige alors que ton identité va encore s’affirmer au fil de tes rencontres. Si, malgré tout, tu as besoin de parler de cela avec eux, tu peux commencer par évoquer l’homosexualité en général, ou l’homophobie dans la société. Puis en venir à ta situation. C’est une démarche courageuse de ta part, et nul doute qu’ils sauront t’écouter. Ils te diront, peut-être, de laisser du temps avant de te déterminer, car tu es très jeune.
- L’astuce en + : Si tu préfères, tu peux en discuter avec une autre personne en qui tu as confiance : ami(e) ou adulte de ta famille, voire avec l’infirmière scolaire.
“Je veux aller voir un psy”
L’état des lieux
Avoir un coup de blues – ou pire – quand on est ado, ça arrive hélas à beaucoup… Dans ce cas, vouloir consulter pour tenter d’aller mieux, c’est très recommandé, mais tes parents peuvent être surpris si l’initiative vient de toi.
Le conseil d’Okapi
Sans doute tes parents auront-ils envie de savoir pourquoi tu fais cette demande. Que se passe-t-il ? Tu n’es pas obligé(e) de le leur dire. Ils doivent comprendre que tu préfères parler de certains sujets à une personne extérieure. Demander de l’aide requiert du courage et de la maturité, ils devraient être sensibles à cela.
- L’astuce en + : Certaines structures existent dans lesquelles tu peux solliciter un(e) psy. C’est le cas du Fil Santé Jeunes (0 800 235 236, de 9 à 23 heures). C’est gratuit, anonyme et confidentiel.
“Je veux plus d’argent de poche”
L’état des lieux
Se payer un kebab ou acheter un manga, ça coûte cher ! Et tu aimerais bien une petite rallonge…
Le conseil d’Okapi
Avant de réclamer quoi que ce soit, vois déjà si tu es dans la moyenne : pour info, les 10-12 ans perçoivent en moyenne 23 € par mois, les 13-14 ans 26 €… Lors de ta demande, propose une somme raisonnable. Et précise pourquoi tu en as besoin.
- L’astuce en + : Explique que tu sauras gérer ton budget. Et rends-toi utile à la maison, cela augmentera tes chances d’obtenir cette éventuelle augmentation.
“Ça y est, je suis en couple”
L’état des lieux
Depuis hier, tu es in love, tu y penses sans cesse et, bien sûr, tu aimerais que la Terre entière soit au courant, à commencer par tes parents ! Mais vont-ils prendre cette toute nouvelle histoire au sérieux ?
Le conseil d’Okapi
Rien ne t’oblige à annoncer ce changement. Il sera bien temps dans quelques semaines, si cela dure. Et dans le cas contraire, cela t’évitera d’avoir à expliquer pourquoi ça n’a pas marché. Après tout, il s’agit de ta vie intime, et de quelque chose qui te rend heureux(se), alors tu peux préserver ce jardin secret.
- L’astuce en + : Tes parents devineront peut-être ton bonheur tout seuls ! Tu peux aussi commencer par mettre d’autres membres de ta famille dans la confidence : grands-parents, cousin(e)s, etc.
“Je veux arrêter le piano”
L’état des lieux
C’est simple : tu continues à pratiquer parce que tu sens que c’est important pour tes parents. Mais en réalité, tu ne t’amuses pas tant que cela. Et ça vaut aussi pour le foot, la danse, la natation, le scoutisme, etc.
Le conseil d’Okapi
Avant d’aborder le sujet, liste tout ce que l’activité t’a apporté de bénéfique, afin de montrer à tes parents que, de ton point de vue également, cela n’a pas servi à rien. Bref, prends soin de valoriser leur choix. Rassure-les aussi en leur disant que tu ne vas pas passer tes après-midis à geeker. Tu as juste d’autres centres d’intérêt.
- L’astuce en + : Prends l’initiative : montre que tu t’es renseigné(e) sur une autre activité qui t’attire plus. Et propose un marché : continuer à faire ce qu’ils veulent pour toi, tout en démarrant cette autre activité. En te voyant t’éclater dans cette nouvelle pratique, ils se rendront à l’évidence.
“Je veux sortir avec mes ami(e)s”
L’état des lieux
Fête, soirée pyjama, sortie ciné ou piscine… Pour la première fois, tu es invité(e) à une sortie de groupe, ou tu voudrais en proposer une ? Oui, mais il faut demander l’autorisation.
Le conseil d’Okapi
Si tu es l’aîné(e) – ou enfant unique –, tes parents risquent d’appréhender le moment de ta première sortie entre potes. Normal, ils veulent te protéger. Dis-leur bien où et avec qui tu comptes sortir, le temps que ça peut prendre, etc.
- L’astuce en + : Ne les préviens pas au dernier moment. Et si possible, commence avec des copains dont ils connaissent les parents.
“Cessez de fouiller dans mon téléphone”
L’état des lieux
Le smartphone, c’est le journal intime 3.0 ! Et comme avec un vrai journal, tu ne veux plus partager tes conversations… Or tes parents regardent de temps en temps ce qui s’y raconte.
Le conseil d’Okapi
Ton jardin secret, tes parents doivent le respecter, c’est vrai. Tu as le droit de leur dire qu’ils n’aimeraient pas que tu fasses la même chose. Mais t’es-tu demandé pourquoi ils ont ce besoin de fouiner ? Pure surveillance ou amour pour leur enfant qu’ils cherchent à protéger ? Alors parlez-en !
- L’astuce en + : Quand tu rentres du collège, ne cours pas t’enfermer dans ta chambre. Associe davantage tes parents à ta vie. Si un climat de confiance s’instaure, ils n’éprouveront plus le besoin de “fouiller”.
“Je déteste mon beau-père ou ma belle-mère”
L’état des lieux
Tes parents sont séparés, et avec le nouveau beau-parent, le courant ne passe pas du tout… Dois-tu le dire ? Et comment ?
Le conseil d’Okapi
Évite d’attaquer de manière frontale en disant que tu le/la détestes ! Cela mettrait ton parent dans un conflit de loyauté entre deux êtres qu’il aime. Avant cela, recense ce qui ne va pas. Puis va lui expliquer que tu te sens mal, que tu aimerais que les choses s’améliorent et qu’il/elle doit t’aider. Peut-être en organisant des sorties ensemble pour apprendre à vous apprécier. Ou en discutant à trois : après tout, l’amoureux(se) ne se sent peut-être pas bien non plus. Les efforts doivent être partagés !
- L’astuce en + : Ton beau-parent a peut-être des enfants dont tu pourrais te rapprocher ? Cela facilitera ensuite ta bonne entente avec lui.
“Chacun à droit à son jardin secret”
3 questions à Stephan Valentin, psychologue
Doit-on tout dire à ses parents ?
Non ! Chacun a droit à un jardin secret, pour garder des choses pour soi, loin du jugement des autres. On en parle si on en a envie. C’est comme la chambre : c’est votre territoire qui a le droit d’être en désordre et dans lequel vos parents n’ont, en théorie, pas le droit de pénétrer sans votre accord.
Comment le leur faire comprendre ?
Ce n’est pas facile car à l’adolescence, on est à un âge où l’on est souvent avec ses camarades. Les parents ont l’impression d’être coupés de leur enfant, de ne plus le connaître. Ils sont aussi effrayés de voir que leur “bébé” grandit. Le mieux est d’en parler. Parfois, on se dit qu’ils ne comprennent rien, alors qu’ils sont capables d’entendre ce qu’on a à dire !
Comment préserver son jardin secret ?
Cela requiert de la confiance et de la compréhension mutuelle. Pour que les parents respectent cela, il faut leur donner accès à certains pans de notre vie d’ado afin qu’ils s’inquiètent moins.
Les do et les don’t du dialogue
🙂 🙂 🙂
• Noter en amont ce que tu as à dire.
• Exprimer ce que tu ressens.
• Couper ton portable (ou la télé) pour éviter d’être dérangés.
• Amener le sujet de manière naturelle.
🙁 🙁 🙁
• Entamer une conversation quand tes parents sont occupés, fatigués ou énervés.
• Être dans le reproche à leur encontre.
• Essayer de minimiser les problèmes. Exemple : “Ce n’est pas de ma faute si mon prof de maths m’a collé(e).” Euh, si, au moins un peu !
• Te disputer avec eux s’ils ont l’air perplexes. Tu dois entendre ce qu’ils ont à te dire.
Podcast Ma vie d’ado : “Moi, les parents, j’en fais ce que je veux !”
Dans ce nouvel épisode du podcast Ma vie d’ado, des ados témoignent et racontent leurs techniques pour demander des choses à leurs parents.
Plus de 120 épisodes disponibles, à écouter sur toutes les plateformes…