Moins médiatique que le dérèglement climatique, le déclin de la biodiversité est un sujet tout aussi inquiétant pour notre planète. Le magazine Phosphore présente aux 15-18 ans cinq actions mises en place pour lui venir en aide. De quoi s’inspirer pour les bonnes résolutions de nouvelle année!
Sauver les espèces menacées
Pourquoi c’est important ?
Tu connais le Giec, ce groupe d’experts qui surveille le climat. Il existe un organisme similaire, l’IPBES, qui suit l’évolution de la biodiversité dans le monde. En 2019, il a publié un rapport explosif : 1 million d’espèces animales et végétales risquent de disparaître dans les décennies à venir ! La biodiversité représente les plantes, les animaux, les micro-organismes existant sur Terre, ainsi que tous les milieux dans lesquels ils vivent (sol, eau…). Souviens-toi que toutes les espèces sont en interaction, elles se mangent entre elles ou se protègent. Si l’une disparaît, une autre peut s’éteindre et ainsi de suite…
Initiative : S.O.S. Mouflon en danger !
Pierre Benedetti, qui travaille à l’Office français de la biodiversité, a consacré sa vie à éviter l’extinction des mouflons de Corse. “Si nous n’avions rien fait, tous auraient disparu en 30 ans !”, raconte-t-il. Ce mouton aux belles cornes enroulées vit sur l’île depuis 8 000 ans, sans jamais aucun croisement avec une autre espèce. Mais la présence humaine dans les montagnes l’a progressivement fait disparaître. En 1950, il n’en restait plus qu’une centaine.
Un projet de “réintroduction” du mouflon a donc été mené avec le Parc régional de Corse. Il a fallu capturer quelques bêtes, les faire se reproduire et élever les agneaux dans un espace protégé. L’étape la plus délicate est celle des “lâchers”, car pour survivre, les mouflons ont besoin d’un milieu naturel riche en nourriture, sans risque d’être dérangés par les humains ni dévorés par d’autres animaux. À Bavella, au sud de l’île, l’opération a fonctionné : on y compte aujourd’hui près de 300 mouflons. En 2019, le mouflon corse a même été classé “espèce protégée” !
- À toi de jouer ! Pars à la recherche de la fourmi électrique, une espèce dangereuse originaire d’Amérique du Sud, qui a été repérée près de Toulon. Sa piqûre agit comme une décharge (d’où son nom !) : elle tue les insectes et les oiseaux. Pour savoir si cette espèce envahissante se propage ailleurs, les scientifiques font appel aux citoyens. Si tu observes cette fourmi près de chez toi, prends-la en photo et signale où elle se trouve sur l’application INPN Espèces.
Restaurer l’habitat naturel
Pourquoi c’est important ?
La destruction des habitats (les milieux où vivent les espèces végétales et animales) est la première cause du déclin de la biodiversité. On dit qu’il y a “perte d’habitat” lorsqu’un milieu naturel est transformé pour être utilisé par les humains : quand on déforeste la forêt amazonienne pour cultiver des avocats, qu’on construit des villes sur d’anciennes prairies… Les espèces doivent alors aller vivre ailleurs, et risquent de disparaître. Aujourd’hui, on tente de rattraper les erreurs commises via la “restauration de la nature” : faire en sorte que ces milieux retrouvent leur état d’origine, ou presque. Cela peut se faire par des méthodes douces, à la main. Parfois, il faut des bulldozers ! Une fois ces travaux finis, la nature met souvent des années pour retrouver son équilibre… Bien plus de temps qu’il n’en a fallu aux humains pour la détruire !
Initiative : remise en état des milieux naturels
Agir pour restaurer la nature n’est pas réservé aux pros. Tous les week-ends, l’association Les Blongios embarque une dizaine de bénévoles pour remettre en état des milieux naturels. Équipés de scies, pelles, haches… les volontaires se rendent dans des zones fragiles et difficiles d’accès. Au programme : débroussaillage des dunes de la Baie de Somme, remise en état de la roselière du parc de la Citadelle, à Lille, nettoyage de mares… “Nous rendons l’espace le plus accueillant possible pour faire revenir un grand nombre d’espèces”, explique Florence Joly, qui anime les chantiers. Sur le terrain, pas besoin de compétence technique particulière, un expert est là pour tout expliquer. Ce qui compte, c’est l’envie de réaliser une action utile, de faire de chouettes rencontres et, surtout, de bêcher dans la bonne humeur ! Ça te dit ?
- À toi de jouer ! Sur jagispourlanature.org, une plateforme dédiée au bénévolat nature lancée par la Fondation pour la nature et l’homme, tu trouveras plein d’autres projets auxquels participer pour remettre la nature en état !
Créer des espaces protégés
Pourquoi c’est important ?
On estime que 70 % des terres et 40 % des mers sont abîmées. Le principal responsable : l’être humain ! Créer des aires protégées, où l’activité humaine est contrôlée, est un moyen de préserver la biodiversité. La France est l’un des pays qui en a le plus (environ 30 %), avec les parcs nationaux, les parcs naturels marins, les réserves de faune sauvage… Dans ces lieux, fini les virées en motocross qui traumatisent les animaux sauvages, ou la présence de chalutiers qui raclent les fonds des mers !
Mais au final, à quoi ça sert de faire tous ces efforts pour préserver la biodiversité ? Celle-ci nous rend d’innombrables services. Par exemple, les feuilles des arbres poussent par photosynthèse, elles captent ainsi du carbone et leur ombre permet de réduire les températures. Les abeilles pollinisent les fleurs, ce qui permet la reproduction des fruits et des légumes et assure notre alimentation.
Initiative : des bouées pour faire revenir les poissons !
À Palavas-les-Flots (Hérault), pêcheurs, plongeurs, vacanciers et spécialistes de la nature ont constaté que les poissons et crustacés se faisaient de plus en plus rares. En 2017, une réserve marine délimitée par de grandes bouées a été créée. Dans cette zone grande comme 100 terrains de foot, la pêche et la plongée ont été interdites ! “Les espèces marines ont retrouvé un lieu pour se nourrir et se reproduire librement”, applaudit Peggy Sargian, qui travaille sur les projets maritimes à l’OFB (Office français de la biodiversité). Les résultats sont là : en cinq ans, la variété des poissons est plus grande, ils sont plus nombreux et plus gros ! Aujourd’hui, les poissons de la réserve continuent de se reproduire et peuplent les eaux voisines.
- À toi de jouer ! Si tu aimes regarder les bêtes dans l’eau, inscris-toi à des projets de sciences participatives sur le site sentinellesdelamer-occitanie.fr (il y a aussi un réseau en Normandie). Durant une journée, tu observes certaines espèces marines le long des côtes ou en mer, tu photographies les espèces et notes leur taille et leur localisation. C’est très utile pour les chercheurs, car pour sauver la biodiversité, il faut d’abord la connaître !
Combattre la pollution
Pourquoi c’est important ?
La pollution, autre cause de la perte de biodiversité, se propage partout… Quand des usines rejettent des eaux usées bourrées de substances chimiques, elles polluent les cours d’eau et les sols avoisinants. Quand les véhicules crachent des particules fines, celles-ci voyagent sur des milliers de kilomètres et affectent la santé des plantes et des animaux, les empêchant de croître et causant des maladies.
Initiative : dépolluer grâce aux plantes !
À Bordes, dans les Pyrénées-Atlantiques, 100 000 tonnes de déchets se sont accumulées en 50 ans jusqu’au jour où le fleuve voisin les a embarquées dans toute la vallée jusqu’à la mer. La ville a alors entrepris une “réhabilitation écologique” : les gros déchets sont enlevés pour ne laisser qu’une couche de terre contenant les plus fins. On plante ensuite des végétaux (trèfles, luzerne) qui absorbent le reste des polluants, puis des arbres pour consolider les sols. Aujourd’hui, fini la décharge : à la place, une jeune et belle prairie !
- À toi de jouer ! L’association Run Eco Team a lancé une appli qui allie sport et geste citoyen. Le jeu consiste à prendre en photo des déchets que tu trouves le long de ta course à pied, de les poster sur l’appli en indiquant leur géolocalisation, puis de les jeter à la poubelle, bien sûr ! L’objectif : faire une cartographie des zones les plus polluées.
Lutter contre les inondations
Pourquoi c’est important ?
Climat et biodiversité sont intimement liés… Le dérèglement climatique altère malheureusement cette dernière. Par exemple, l’augmentation de la température des océans modifie la composition de l’eau, qui devient plus acide et met en danger les espèces marines. Mais la biodiversité peut aussi nous protéger des dangers de la crise climatique, comme c’est le cas des mangroves.
Initiative : la deuxième vie de la mangrove
À Mayotte, des mangroves s’étendent sur une partie du littoral. Ce sont des forêts très denses de palétuviers, des arbres qui poussent dans la vase et qui cassent l’énergie des vagues, comme s’il y avait un mur. Elles sont très utiles pour protéger les habitants des tempêtes et limiter la montée des eaux. Mais celle du village de Tsimkoura, au sud de l’île, ne poussait plus à cause des déchets qui y étaient jetés. En 2022, l’association Mangrove Environnement a replanté de nouveaux palétuviers avec l’aide de citoyens, sur près de 500 mètres. Elle organise aussi des visites en kayak dans la mangrove pour les jeunes du village. L’objectif : comprendre son rôle pour, cette fois, y faire plus attention !
- À toi de jouer ! Participe à l’initiative Coastsnap, des observatoires d’un nouveau genre installés le long des plages de Nouvelle-Aquitaine. Prends des photos en plaçant ton téléphone dans la zone indiquée (repérable par des panneaux zones), puis partage-les sur l’appli CoastSnap. À la clé, une accumulation de clichés, en toutes saisons et par tous temps, pour suivre l’évolution des lieux où la côte subit une forte érosion !
À voir pour aller plus loin Sur YouTube, Ta Mère Nature, des vidéos de la blogueuse Ophélie. Au cinéma puis en vod, le film Paradis, sur les incendies qui ravagent les forêts en Sibérie. Ce film a été récompensé au festival Film for planet de Porquerolles.