Bienvenue à l’adolescence, l’âge des grands changements où l’on déteste être pris pour un enfant, où l’on ne supporte pas d’attirer l’attention… et où l’on redoute par-dessus tout une apparition déplacée de ses parents devant toute sa bande ! Avec humour, Okapi, le magazine Bayard Jeunesse des 10-15 ans, dresse le paysage des situations embarrassantes, avec la complicité des ados eux-mêmes ! Voilà un beau thème de discussion à la maison en perspective…
Si vous avez vu Vice-Versa 2 au cinéma avec vos ados, il ne vous aura pas échappé que plusieurs nouvelles émotions font irruption dans la vie, et le cerveau contrarié, de Riley, l’héroïne devenue adolescente accomplie. Parmi ces nouveautés, l’embarras occupe une place de choix, et ce n’est pas un hasard. Car si une émotion est emblématique de cet âge rempli de contradictions, c’est bien celle-ci, que l’on appelle plus volontiers « gênance » dans les cours de récré (le mot a même fait son entrée dans l’édition 2023 du Petit Robert).
De fait, on n’est sans doute jamais autant soucieux qu’à l’adolescence de l’image que l’on renvoie et de l’impression que l’on fait sur ses congénères. Et quand on a 12 ou 13 ans, l’alarme rouge de la gênance se déclenche à la moindre occasion. Une faute de goût sur une fringue, une réplique qui tombe à plat, une réflexion de prof qui vous attire tous les regards…
Okapi a mené l’enquête auprès de collégiennes et de collégiens parisiens dans son numéro du 15 janvier 2025. L’objectif ? Tenter, avec leur complicité, d’établir un « baromètre de la gênance », et, par la même occasion, apprendre à démystifier ces moments incongrus et savoir en rire…
Chacune, chacun, était invité à évoquer des situations de gêne plus ou moins drôles ou éprouvantes, et à les classer dans l’ordre sur une sorte de grande échelle… Il en découle tout un tas de cas de figure : embarras de se sentir différent(e), de voir ses sentiments révélés au grand jour, de sentir tous les regards sur soi…
Enfin, comble de la gênance pour les adolescents consultés, embarras de se retrouver au cœur d’une interférence entre ses parents et sa bande de potes. Étonnant ? Pas tant que ça, font valoir les spécialistes interrogés par Okapi. Les parents n’évoluent pas dans la même sphère que les amis, ils sont susceptibles de révéler des secrets anodins à leurs yeux mais absolument inavouables devant les potes, tant cela touche à l’intimité du cercle familial. Ligne rouge… et beau thème de discussion à la maison en perspective !
Jean-Yves Dana, rédacteur en chef d’Okapi
C’est un peu gênant à l’adolescence… quand tu ne te sens pas comme les autres
As-tu vu le film Vice-Versa 2 ? Une émotion y apparaît à l’adolescence : l’embarras ! Pour Okapi, des collégien(ne)s ont classé des situations sur l’échelle de la gêne. Et on te propose nos conseils pour surmonter le malaise !
À l’adolescence, tu changes physiquement et tu dois gérer davantage tes émotions en solo, sans pouvoir t’abriter derrière le “rempart” de tes parents. Dans certaines situations inédites, un sentiment de gêne et de honte peut apparaître. Car à l’adolescence, tout le monde ne grandit pas au même rythme. Même par rapport à tes potes, tu peux parfois te sentir en décalage. Et ça, ça peut être super embarrassant à vivre !
Le conseil d’Okapi
Trouve-toi des ami(e)s qui te ressemblent et avec qui tu peux rester toi-même de façon spontanée, sans crainte du jugement des autres.
Témoignages d’adolescent(e)s
• « Quand mes copines disent “baka”, je trouve ça gênant. » Mariam, 11 ans
• « Quand tu dis “quoicoubeh”, mais que personne ne rigole, ça fait un flop. » Nolan, 11 ans
• « Un jour, en cours, un garçon répétait sans cesse “quoicoubeh, c’est drôle”, et la prof lui a répondu “Oh ! Vous êtes gênant, en plus, quoicoubeh, c’est démodé !” » Anonyme, 12 ans
• « C’est gênant quand tu te présentes comme délégué ou que tu fais un concours, par exemple de dessin, et que personne ne vote pour toi, ou que le seul vote pour toi, c’est le tien… » Dylann, Adam et Sviatoslav
• « Une fois, au foot, j’étais goal. Et pendant un match, je me suis pris un but par un CP… Mais le problème quand tu es goal, c’est que toute l’équipe t’en veut alors qu’en vrai, c’est eux qui ne sont juste pas revenus en défense. » Adam, 11 ans
C’est très gênant à l’adolescence… quand les autres entrent dans ton intimité
Entre ton corps qui se transforme et ta personnalité qui a besoin de s’affirmer, tu sens qu’il y a une différence entre l’image que tu renvoies et ce que tu aimerais que l’on pense de toi. Surtout quand les réseaux sociaux te montrent des images de personnalités aux silhouettes “parfaites” – en apparence –, aux vies un peu trop idéalisées, bien éloignées de ta réalité moins flatteuse… Parfois, de la gêne ou de la honte naissent de cette différence.
Le conseil d’Okapi
Si tu te sens atteint(e) dans ton intimité, le meilleur moyen de défense, c’est de prendre une grande inspiration ou d’en rigoler ! Le rire masque la gêne.
Témoignages d’adolescent(e)s
• « Un jour, je suis allée au cinéma et un garçon a dit que j’étais en crush sur un autre et qu’on allait se mettre à côté, se tenir la main… C’était gênant ! Surtout qu’après, d’autres ont commencé à me poser des questions sur ça… » Anonyme, 12 ans
• « Je faisais un spectacle de théâtre et, pendant une scène, il fallait faire un pas de danse. Mais la personne en charge de la musique n’arrivait pas à l’arrêter… Alors, on s’est retrouvés à faire le même pas pendant 5 minutes. À un moment, dans le public, ma sœur a crié “gênant !”. Ils ont fermé le rideau et arrêté la musique juste après… » Rebecca, 12 ans
• « Un jour, un garçon m’a demandé s’il pouvait prendre mon gâteau. Je lui répondu oui parce que je n’avais pas faim. Mais après, un autre plus âgé qui était à côté a dit : “Ah, vous êtes in love, vous allez vous marier ! Haha c’est ta femme !”, juste parce que je lui ai donné un gâteau… » Anonyme (fille), 12 ans
• « Un jour, pendant un contrôle d’anglais, un garçon a crié “Une souris !”. Tous mes camarades et moi avons sauté sur nos chaises et commencé à crier. » Aliénor, 12 ans
• « C’est gênant quand un de tes amis hurle ton prénom dans la rue. » Anonyme, 12 ans
C’est super gênant à l’adolescence… quand tu es au centre de l’attention
À l’adolescence, ce n’est pas toujours évident de comprendre ce qu’on attend de toi. Alors tu peux te montrer maladroit(e) dans certaines situations et avoir des réactions gênantes ou gênées. Par exemple, en bégayant quand on te pose une question. Ou en te sentant obligé(e) de te justifier à cause d’un simple malentendu…
Le conseil d’Okapi
Tu ne joues pas ta vie lors de ces petits moments qui arrivent régulièrement. Pour ne pas perdre tes moyens quand tout le monde te regarde et désamorcer la gêne, change de sujet, ou abonde dans le sens de la situation en reconnaissant ta gêne. C’est le meilleur moyen pour qu’on te laisse tranquille…
Témoignages d’adolescent(e)s
• « Un jour, j’avais une compétition de judo et mes parents m’ont accompagnée. En me changeant, j’ai trouvé que les autres étaient plus grandes que moi… Sur le tatami, le manager m’a dit que c’était une compétition pour les minimes, donc des filles plus âgées que moi ! Il a pris le micro et a appelé mes parents… Tout le monde avait les yeux rivés sur moi, j’étais super gênée. » Aliénor, 12 ans
• « Ce jour-là, il pleuvait et j’étais en retard pour mon cours de musique. Je montais vite dans les escaliers, j’ai glissé et suis tombée devant tout le monde… Les gens se sont arrêtés et m’ont regardée. J’ai essayé de me relever et de faire comme si de rien n’était, mais j’ai entendu une fille demander ce qui c’était passé. Et on lui a répondu en rigolant : “La fille est tombée devant tout le monde !” C’était trop gênant !!! » Rebecca, 12 ans
• « En maternelle, je fêtais mon anniversaire et, à la fin de la chanson, tout le monde a crié en chœur : “Un discours ! Un discours !” Trop gênant… » Dylann, 12 ans
• « Quand en classe, on pense avoir la bonne réponse, on lève la main, et en fait, c’est faux… » Ylann et Adam, 12 ans
• « Un jour, au centre de loisirs, l’activité était de rapper. On était obligé de passer devant tout le monde… C’était gênant, et en même temps, trop bien ! » Anonyme, 11 ans
C’est affreusement gênant à l’adolescence… Quand tes parents essayent d’être “cool” avec tes potes
Quand un de tes parents – ou un(e) autre adulte – s’immisce dans ta vie perso, par exemple en essayant d’être drôle avec tes ami(e)s, une gêne peut se créer. “Que va-t-il dire ? Et si elle révèle quelque chose d’intime sur moi… ?” Alors, si la gêne te gagne, soit tu discrédites ton parent et tu ris de lui avec les autres, soit tu lui demandes de partir et ça fait rire tes ami(e)s, car tu as eu l’ascendant sur l’adulte. Dans tous les cas, tu ne te sens pas bien.
Le conseil d’Okapi
Prends le temps de débriefer avec le parent “coupable” de t’avoir mis mal à l’aise, explique-lui ta réaction, si possible sans énervement ! Et en gage, demande-lui de te raconter une situation équivalente dans sa propre adolescence, histoire d’en rire ensemble et de faire retomber la tension.
Témoignages d’adolescent(e)s
• « Un jour, je suis sortie pour aller chercher mes frères et sœurs. En route, ma mère m’a appelée en criant au téléphone. Sauf que, sans le faire exprès, j’ai activé le haut-parleur ! J’étais super gênée ! Alors j’ai couru et je suis rentrée. » Sophie-Élise, 11 ans
• « Quand tes parents font une blague soi-disant drôle devant tes potes alors que ce n’est pas du tout drôle… » Nine, 12 ans
• « J’étais à une fête, ma mère dansait sur des musiques actuelles et elle a voulu que je la rejoigne ! Mais j’étais trop gênée parce que j’étais avec mes copines ! » Anonyme, 11 ans
• « J’étais en cours et une fille a dit que les gothiques, c’étaient des “bakas”. La prof lui a demandé ce que ça voulait dire et elle lui a expliqué en lui montrant la danse typique. Et là, la prof a reproduit les mouvements devant tout le monde… » Anonyme, 13 ans
• « Un jour, ma mère m’a dit “quoicoubeh”, et mon frère et moi, on était en mode : “Maman, t’es gênante !” » Anonyme, 11 ans
Pour aller plus loin
- Vice-Versa 2, des studios Pixar. Ce film d’animation te permettra de te projeter dans une belle histoire, et d’identifier et comprendre les émotions qui te traversent.
- C’est (pas) moi, c’est mon cerveau !, de Grégoire Borst et Mathieu Cassotti, aux éditions Nathan. Ce livre aide à mieux comprendre tes émotions grâce à des situations concrètes.
Merci aux collégiens du dispositif TAC des collèges Guillaume Apollinaire et François Villon à Paris. Merci à Christèle Cedat, psychologue clinicienne, et à Hélène Maire, enseignante-chercheuse en psychologie à l’Université de Lorraine.